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Fulgur - Le don de bravoure

🇫🇷Erika_D974
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Synopsis

Chapter 1 - Le don de connaissance

Je m'appelle Kristen Davis et j'ai dix sept ans. J'ai un frère jumeau, Cyril. Il est grand, assez musclé, blond aux yeux bleu... Tout le contraire de moi qui suis, petite, maigrichonne, brune aux yeux noir... Il a reçu son don aujourd'hui... 

Mon père nous a expliqué comment cela fonctionnait. Un jour, un seul, nos yeux prennent la couleur d'un diamant :

* Carbonado – diamant noir – pour les connaisseurs,

* Péridot – diamant vert – pour les culturistes,

* Citrine – diamant jaune-dorée – pour les sages,

* Aigue-marine – diamant bleu – pour les braves et

* Rubis – diamant rouge – pour les réalisateurs.

La couleur de nos yeux redevient diamant, seulement lorsqu'on utilise notre don. 

Les yeux de mon frère sont carbonados ; les yeux de la connaissance. En juillet, à la prochaine rentrée, il fera ses débuts en études de médecine ou d'instituteur. Moi, j'espère avoir le même don que lui pour que nous ne soyons pas séparés mais... j'ai comme un doute.

 

J'ai entendu mon frère parler de son don à maman. Ils étaient dans la chambre de Cyril. Toutes les maisons se ressemblent sur l'île ; aucune fioriture. Elles sont toutes composées de deux ou trois chambres mais le reste est identique. 

Notre maison n'est pas immense mais quand même... Il y a trois chambres avec une salle de bain dans chacune et un salon - salle à manger. C'est très modeste. Nous avons un canapé et une petite table, avec une grande bibliothèque remplie de livre.

Ma mère adore lire. Bon, elle est connaisseuse, jusque-là, c'est normal !

Notre salle à manger est composée d'un vaisselier, quatre chaises et une table. Dans notre maison cela sent la forêt car celle-ci est située à côté. J'adore cette odeur de nature, c'est apaisant. Je préfère la forêt à l'eau. Je ne pourrais pas habiter en bord de mer. En effet j'ai peur de tout ce qui peut se cacher dans l'océan : les requins, les méduses et quoi d'autres… qui sait ? J'ai aperçu un requin de loin un jour, alors que je nageais. J'avais six ou sept ans, je crois. Il était loin, certes, et sans doute petit pour passer la barrière de corail comme me l'a expliqué mon père, mais je sais qu'il était là. L'océan et ses secrets m'angoissent profondément depuis ce jour-là. 

- Tu as vu ? J'ai le don de la connaissance, maman. 

Je reconnais des intonations de fierté dans la voix de mon frère. Elle est joyeuse ce qui est rarement le cas. Il a depuis toujours une voix profonde, comme celle de ma mère. Mais je comprends sa joie. Il a raison. Le don de « connaissance » n'est pas pour tout le monde ». Je me lève du canapé où je suis installée au côté de mon père pour me rapprocher de la porte de la chambre de mon frère et écouter, sans aucune retenue, à la porte.

- Ce don est tellement rare, mon fils.

- C'est vrai ? Maman, c'est super !

- Oui, c'est vrai. Félicitation ! Tu seras un brillant médecin, j'en suis certaine.

- Je serais comme toi. Je suis trop heureux, maman.

Mon père voit bien que j'écoute. Il tente de me rassurer en frottant mon bras de sa main. Quant à moi, je cesse d'écouter et retourne m'asseoir sur le canapé avec mon père. À son habitude, ce dernier s'assoie et pose son pied droit sur son genou gauche. Il tente de m'apaiser en prenant mes deux mains dans les siennes.

- Ton don arrivera, quand tu seras prĂŞte, mon enfant...

- Je sais. J'aurais voulu qu'il arrive aujourd'hui moi aussi, comme Cyril. On est jumeaux. C'est vraiment injuste ! Marmonnais-je sans conviction.

- Ce n'est pas ça. La nature a voulu que ton frère ait son don aujourd'hui.

- Tu t'imagines si jamais je n'ai pas de don ?

- Bien sûr que si ma fille ! Ton don arrivera quand ton corps aura totalement récupéré.

- Je suis heureuse pour Cyril. Seulement, j'aurais voulu que cela m'arrive à moi aussi. Me justifiais-je. J'ai le sentiment que les bonnes choses ne sont jamais pour moi. Qu'est-ce que j'ai fait pour qu'il ne m'arrive que des mauvaises choses ?

- Tu ne comprends pas mon enfant. Si Dieu te donne plus d'Ă©preuves Ă  surmonter c'est simplement qu'il t'en sait capable.

- Pourtant je sais que je n'étais pas capable d'affronter ce qui m'est arrivée il y a deux semaines... Et je ne le suis toujours pas !

- Il t'est arrivé une chose affreuse il y a deux semaines, j'en conviens. Mais, Kristy, il faut se remettre d'un tel choc. Tu as mis du temps à parler après... « Ça ».

- Oui… c'est vrai - dis-je d'une voix hachée.

- Tu te souviens que tu avais peur que je te prenne la main, que je te prenne dans mes bras ? Tout ce que tu as vécu, tu dois le surmonter, tu y parviens un peu plus chaque jour. Regarde aujourd'hui, tu parles, je te caresse la main et tu es même capable de m'houspiller - Dit-il en souriant - Et ensuite tu auras ton don, ne t'en fais pas.

- J'espère que tu as raison papa. Je ne voudrais pas être la seule personne sans don de Fulgur. Je déteste me faire remarquer mais là ce serait un bon moyen d'avoir la tête la plus célèbre dans ce bas monde - ricanais-je.

 

Mon père sourit avec moi. Il sait que je n'aime pas être mise en avant. Je ne comprends pas les personnes qui ont besoin absolument de briller pour exister !

 

- Tu sais papa, ce qui m'effraie le plus ?

- Dis-moi, mon enfant. Je t'Ă©coute.

- J'ai peur de ne pas me retrouver avec Cyril. - J'ai surtout peur de me retrouver sans lui, face à ces... « g... g... ga...arçons ».

Zut, voilà que je me mets à bégayer maintenant ! Je ne sais pas trop si c'est avec colère ou peur que je prononce ce mot, mais en tout cas, il ne sort pas facilement de ma bouche.

- Oh... Je... Je n'avais pas vu les choses comme cela. Si vous vous retrouvez dans le même lycée, j'irais parler à tes professeurs, d'accord ?

- Non, surtout pas ! Ce que je veux dire, c'est que Cyril me protégeait ; Il l'a toujours fait. Il est grand et fort, tout le contraire de moi. Quand des camarades de classes voulaient se moquer de vous qui êtes contre-nature, ils venaient s'en prendre à moi, jamais à Cyril.

Mon père grimaçe au terme « contre-nature ». Moi aussi je déteste cette terminaison mais c'est comme ça que l'on appelle un couple qui n'est normalement pas fait pour s'entendre, à cause de leur don. Mes parents sont l'exemple type de cette situation. Une connaisseuse, qui ne croit qu'en la science, en la logique, qui ne s'appuie que sur des faits, aime un sage, mon père, qui croit en Dieu, en quelque chose qui ne peut ni voir, ni toucher. Il a la foi, simplement. Plus opposé c'est possible ? Non ! voilà pourquoi nous les appelons sur notre île les « contre-nature ». Ici les couples se forment logiquement sur leur ressemblances, mais surtout, sur leur don.

- Il est très facile de s'en prendre à une personne plus faible que soit, Kristy. La vraie force, vient de ceux qui se pensent faible et ont le courage d'affronter ceux qui se pensent fort.

 

Je n'ai jamais envisagé les choses comme ça. Avec du recul, je comprends que c'est ce que j'ai fait, moi, petite et frêle. Je les ai affrontés, sans me décourager, malgré ma peur.

 

- Finalement, je ne veux pas être connaisseur, je veux avoir un don différent de celui de Cyril, pour me détacher, non pas de mon frère mais de mon protecteur. J'aime Cyril mais il a trop longtemps tenu ce rôle. Je serais heureuse de le quitter le matin, le retrouver le soir pour lui raconter ma journée. Si ça signifie que je dois me retrouver toute seule, ça me va. Moi j'aime mes parents contre-nature !

 

Alors que mon père ouvre la bouche, avec un sourire tendre pour me parler, Cyril et maman arrivent. Je me dirige vers mon frère et, à la façon dont me regarde ma mère, je me rends compte qu'elle guette ma réaction. Je souris de toutes mes dents, indubitablement gaie pour mon frère. Cyril se tient, épaules voûtées et tête baissée, position qu'il a depuis toujours dès qu'il est pris en faute. Il me regarde et comprend. Aussitôt, un sourire illumine son visage et ses yeux carbonados brillèrent encore plus intensément. Cyril me soulève dans ses bras et me serre contre lui, soulagé de ma réaction.

 

- Je suis tellement heureuse pour toi - dis-je Ă  Cyril.

- C'est vrai ? Me demande-t-il.

- Bien sûr. Je suis triste de ne pas avoir reçu mon don le même jour que toi. Cela ne veut pas dire que je ne suis pas contente pour toi. Je t'aime et je suis très fière de ce que tu es et des belles choses qui te sont arrivées, qui t'arrivent et qui t'arriveront. Le don de la connaissance en plus ! Tu es sûr que cette fois, je ne te suivrais pas ! rigolais-je. 

Ma phrase fait rire mes parents et Cyril. Je suis née juste après Cyril. Ma mère nous a raconté un jour, que j'ai quasiment poussée Cyril pour sortir ce qui nous séparent d'à peine une minute.

Déjà dans le ventre de maman, Cyril était énorme et moi toute petite. Les docteurs avaient remarqué ma présence qu'au quatrième mois de grossesse. Ils pensaient que l'écho des battements du cœur était dû à une anomalie de leur machine. Pour l'échographie des douze semaines, j'étais caché par mon frère, mais un jour, ma mère a senti quelque chose, nous avait-elle raconté. Elle était allée faire des examens et c'était là qu'ils m'avait vu. Mon frère me faisait un câlin, son petit bras (de la taille de ma cuisse) était au-dessus de mes épaules et nos visages collés l'un à l'autre. Les médecins avaient donné peu d'espoir me concernant. J'étais si petite. Cyril ne me laissait rien. Mon frère faisait 3 kg 600 à la naissance et moi à peine 2 kg 300.

- Enfin, tout ça pour dire, que nous nous sommes suivis : découverte de Cyril, puis de moi, naissance de Cyril, puis la mienne. Mais là, pas de risque, me connaissant, cela m'étonnerait beaucoup de recevoir le don de connaissance bientôt. Un autre don, j'en suis certaine, mais lequel ? Cela, je n'en savais rien. Je n'ai pas la main verte mais j'ai beaucoup d'imagination… réalisatrice peut-être ?

 

Mon frère me serre fort contre lui.

- Merci Kristen. Merci d'être heureuse pour moi. Cela compte beaucoup. Je suis sûr que ton don arrivera bientôt tu sais. Et cela ne m'étonnerait pas que tu sois une sage.

- Je ne pense pas. C'est papa qui me souffle les répliques, moi je ne fais que les répéter. Cela me donne un air assez sage, mais tu connais l'expression, être née vieille ? Et bien sache que je n'étais pas plus avisé que toi à notre naissance. Je ne crois pas en tout.

Mon père éclate de rire.

 

- Tu as raison ma fille. La seule personne en qui l'on peut croire c'est en Dieu.

- Oui ou nous ne pouvons croire que ce que nous pouvons voir. Intervient ma mère.

- Oui, mais après réflexion, le don de réalisation m'irait très bien.

- Je suis d'accord avec maman, moi.

- Pas Ă©tonnant, tu es un connaisseur, maintenant.

- Non, ce n'est pas ça, mais la science est une chose concrète.

- Il te faut avoir raison, n'est-ce pas ? Un vrai connaisseur ! - Ricanais-je.

Quand nous commençons à nous taquiner, c'est que tout va bien. Après tout, nous sommes frères et sœurs.

 

- Je te trouve bien impertinente ! Tu me défies alors que je suis plus fort et plus intelligent que toi. Ton courage dépasse l'entendement… une sage ? Non ! Je retire ce que j'ai dis… Tu es bien trop imbue de ta personne. Pourquoi pas une brave ? Qui sait ? La plus grande de toute ! - Me taquina Cyril.

Cette phrase me fait l'effet d'une douche froide. Mon grand-père paternel, chef brave respecté, n'aurait pas été du même avis, surtout avec ce qui m'est arrivée. Même si papa pense qu'il faut du courage pour vivre avec ça.

 

- Je... Je ne pense pas. Je... 

Je suis très mal à l'aise. Mon frère comprend l'embarra dans lequel il m'a mise. Je le vois à son visage qui pâlit. Il comprend mon mal-être. Il me connaît et sais que je croise mes bras pour me protéger. Je baisse la tête.

 

- Comment avoir le don de la bravoure quand on a vécu ce que j'ai vécu... ? En plus, je suis une vraie éponge, je pleure pour rien et souvent. Je ne suis pas pleurnicharde quand même mais bon...

 

Mon père s'approche de moi et frotte mon bras. Je le regarde, vois dans ses yeux, tout l'amour, la tendresse et le réconfort dont j'ai besoin pour aller mieux. Mon père a toujours su me rassurer, m'apaiser et me comprendre. Il est merveilleux. Ce dernier reprend la parole lorsqu'un sourire fugace se dessine sur mes lèvres.

 

- Ma fille, ton don ne te définira pas, ne sois pas angoissée. Peu importe le don que tu auras, je suis sûr que tu t'en serviras à bon escient. Je sais que tu n'oublieras jamais qui tu es.

- Mais si mon don n'arrive jamais ? J'ai l'impression que mon attente est sans fin. Chaque matin je me réveille dans l'espoir de voir mes yeux diamants mais ils ne viennent jamais. - Dis-je inquiète.

- Ton don arrivera, mais avec ce qui s'est passé... Il te faut laisser du temps au temps.

- Oui, mais je ne suis pas une personne patiente. Je suis impulsive et je déteste vraiment l'idée de devoir attendre et que ma vie soit régentée par les conséquences de mon agression. Je n'aime pas l'idée que « le processus » du don soit retardé à cause de ça. C'est peut être horrible de dire ça mais je...

- Kristy, regarde-moi. Ton passé est ce qu'il est mais c'est à toi et à toi seule de t'en servir comme d'une force, d'une arme pour avancer. Ton avenir sera défini par la façon dont tu comptes te servir de ton passé. Tu peux t'en plaindre et vivre dans la peur ou tu peux l'accepter et la force que tu y gagneras sera tienne à jamais. Cela te fera avancer la tête haute.

- Tu as raison, papa, je dois vivre avec et m'en servir.

- C'est ce que je fais chaque jour, vivre avec le fait de ne pas avoir pu te protéger, penser à ce qui aurait pu t'arriver, accepter ce que tu as subi...

 

J'entends la peur dans sa voix, si musical habituellement. Je lis la peur dans ses yeux, comme s'il ressassait ce moment, ce cauchemar. Je vois dans la grimace de ses lèvres pincées en ligne étroite, qu'il revoit ce moment-là.

Je me rends compte que Cyril et maman nous ont laissés papa et moi.

Dès que j'éprouve le besoin d'avoir une conversation avec papa, les deux autres membres de la famille ont tendance à s'éclipser sans que je m'en aperçoive.

- Tu sais Kristy, je m'en suis beaucoup voulu ce jour-là. Je n'aurais jamais pensé que des êtres humains de cette trempe existent encore. Sinon, jamais je ne t'aurais autorisé à rentrer seule à pied. Mais c'est fait et je dois vivre avec, en essayant de ne pas me torturer en imaginant ce qu'il te serait arrivé sans ce brave.

Je sais de quoi il parle. Cela fait déjà deux semaines...