La porte du bunker s'ouvrit dans un fracas qui résonna entre les quatre murs de béton. Les hommes armés entrèrent en trombe, le bruit de leurs pas précipités et de leurs respirations accélérées se mélangeant dans un brouhaha incompréhensible et violent. L'individu qu'ils visaient tenait dans son bras gauche un enfant âgé d'une dizaine d'années, sale et rachitique et dans sa main droite, un revolver tendu vers les intrus. Il mêla son cri à ceux des militaires et balança son bras de l'un à l'autre avec frénésie, son étreinte se resserrant à mesure que les canons étrangers se braquaient sur son torse. Derrière lui, une femme et une adolescente, toutes deux semblant maladives, se recroquevillaient dans un coin, l'une dans les bras de l'autre, en pleurant de peur. Dépassant les militaires, Ethan s'approcha lentement de l'homme, les mains en l'air. Il fit signe à ses renforts de baisser leurs armes, qui s'exécutèrent non sans hésitation.-Du calme, articula-t-il lentement. Je ne suis pas armé, voyez ?Il écarta son long manteau noir pour laisser apparaitre son T-shirt et son jean, noirs. L'homme pointa son bras tremblant sur lui et l'inspecta d'un œil inquiet.-Vous voyez ? je ne veux pas vous blesser. Mais ces hommes derrière moi, n'ont pas les mêmes scrupules, ils ne vous laisseront pas tirer, ils ne vous laisseront pas blesser l'un des leurs ou le garçon. Croyez-moi quand je dis que vous ne serez pas aussi rapide qu'eux, ce sont des professionnels. Alors (il s'approcha d'un petit pas) je vous demanderai de baisser votre arme, s'il-vous-plait.Le corps entier de l'homme se contracta à l'approche de l'élémental et Ethan recula en levant un peu plus les mains en signe de reddition.-Ok, ok. On se calme. Je ne faisais que parler.Derrière lui, les militaires trépignaient d'impatience sous la tension qui montait. Le garçon étouffait sous la pression qu'exerçait le bras contre son cou. L'homme était secoué de tremblements.-N'approchez pas ! menaça-t-il.Et Ethan vit son doigt se replier contre la détente. Il agita la main et le revolver fondit dans celle de l'homme. Le métal se remodela en une fourchette à trois dents. L'homme resta bouche bée face à la déformation de son arme à feu et fixait son poing hébété. Il lâcha son emprise et le garçon se dégagea pour rejoindre sa mère et sa sœur. L'homme se réveilla alors et attaqua, dans un cri de rage, l'élémental qui souriait, fier de son œuvre. Il sauta sur lui, fourchette en avant et resta figé, l'arme à quelques centimètres de l'œil de Ethan. Une glace épaisse l'avait recouvert et le scelait au sol de béton.-Ha, merci, souffla Ethan à l'arrivée de Halica tandis que les hommes du colonel Loptr se précipitaient vers les victimes.-Une fourchette ? alors que tu pouvais le fondre en n'importe quoi ?-Justement, répondit-il l'œil pétillant, n'importe quoi.Halica lâcha un minuscule rictus que Ethan prit pour un sourire et une victoire de plus de son humour. Un militaire se posta vers eux et demanda s'ils pouvaient emmener l'homme. Halica fit fondre la glace et le prisonnier reprit son souffle, aspirant l'air chaud avec difficulté.-Il faudrait vraiment que vous arrêtiez de les transformer en glaçon, mademoiselle Jay, intervint le colonel Loptr en ordonnant à ses hommes de l'emmener. Vous finirez par en tuer un par asphyxie, un jour, et ce n'est pas ce que nous voulons.Elle ne répondit pas. En plus de son mépris pour l'espèce humaine, elle n'aimait pas que l'on critique ses méthodes et encore moins qu'on l'appelle « mademoiselle ».-Mademoiselle Jay, le jour où vous comprendrez que je suis de votre côté, j'espère que nous pourrons enfin avoir une conversation correcte. D'ici là, et bien... essayez au moins de collaborer sérieusement.Quand tous eurent quittés le bunker, Ethan la prit à part.-Il a raison tu sais, c'est efficace le coup de la statue mais trop dangereux pour les humains. Les élémentaux, je dis pas... mais les humains et mutant, ils meurent s'ils ne respirent plus. Tu n'as jamais eu de problème avant ?-Non. Et ce que vous n'avez pas l'air de comprendre, c'est que confronté à une température extrêmement basse, le corps humain -ou mutant- s'adapte et tombe dans un état de sommeil profond, ce qui fait qu'il peut survivre plusieurs heures sous ma glace. Mais vous semblez mieux connaitre l'élément froid qu'un élémental âgé de plus d'un siècle donc...Ethan la regarda s'éloigner avec l'impression d'avoir dit quelque chose qu'il ne fallait pas.∞∞∞ ∞∞-Flash info ! Une famille qui était séquestrée dans un bunker depuis plus de trois ans a été libérée par les forces armées ce matin, annonça le présentateur du journal télévisé. C'est le père de cette famille qui les a gardés coupés du monde, leur faisant croire à une apocalypse qui aurait ravagée la surface de la terre ainsi que tous ses habitants, les laissant croire être les derniers survivants. Les deux enfants et leur mère, très affaiblis et sous-alimentés, sont maintenant pris en charge par des médecins. Le père, a été abattu.