Rome, Italie, ██/██/2███
J+446
Dans l'ancienne station de train, la jeune femme regardait avec un regard perdu l'immense stèle, immobile, toujours l'arme à la main, mais incapable de détecter les présences des êtres qui l'entouraient désormais.
- Il est relativement surprenant de voir une humaine dans les parages, commença la fille aux cheveux rouges. Que viens-tu faire ici, mortelle ?
- C'est vous qui l'avez tué, répondit la jeune femme sur un ton neutre. Je viens reprendre ce que vous lui avez volé.
- C'est pas l'impression que tu donnais quand ton petit-déjeuner a quitté ton estomac pourtant, fit remarquer une autre femme, une cigarette entre les lèvres.
Sans rien pouvoir ajouter, la policière se contenta de braquer la plus âgée des deux, celle qui soufflait lentement une fumée grise.
- Sais-tu pourquoi je fume tout le temps ? demanda-t-elle en voyant la jeune fille la menacer. Je le prends comme si c'était la dernière, la cigarette du condamné. Et pourtant, après tout ce temps et ces guerres, je suis toujours en vie. Celle qui cherche le plus à mourir ne peut pas voir son souhait exaucé, pas même après la fin de ce monde. Ironique, non ?
En marchant lentement en cercle autour de l'inspectrice, elle continua son monologue, sans réellement se soucier des réactions de son public.
- Quand j'avais à peu près ton âge, le monde était encore plus ou moins équitable, avec les...
Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase.
Et elle ne le pourra plus jamais.
Sans que personne ne puisse réagir, le coup était parti, dispersant dans l'air des morceaux d'os, de chaire, de sang et de matière grise.
Pendant deux longues secondes, personne ne réagit, avant qu'un homme en costume accourut, sortant de l'obscurité, et fonça en ligne droite vers le corps maintenant inanimé au sol.
- Gabrielle ! cria-t-il en prenant le cadavre dans ses bras.
Il tenta désespérément, et en vain, de rassembler les fragments de son crâne, comme un enfant étranger à le notion de mort devant le corps de sa mère.
Son costume, d'habitude si propre et soigné était maintenant tout taché et couvert de sang, qui n'était, malheureusement ou bien heureusement, pas le sien.
Lorsque la demi-humaine reprit enfin ses esprits, et se jeta sur la policière, un deuxième coup parti, dans une direction assez inattendue, ce qui surprit légèrement le loup-garou.
Un petit impact apparu sur la pierre polie, créant une irrégularité dans les paternes répétitifs des caractères ensanglantés.
La balle ricocha, rebondit contre un autre mur, et alla se planter dans les côtes droites de la fille suspendue en l'air, comme figée dans le temps.
Lorsque le morceau de métal s'enfonça dans sa peau, un spasme l'agita, la faisant misérablement tomber au sol, en boule sur elle-même, comme un chat qu'on aurait blessé.
Après que les deux coups de feu furent tirés et que ses deux alliées et amies se soit retrouvées au sol, l'homme en costume se retourna et, dans un élan de colère, lança d'une trajectoire bien trop précise pour un humain, son stylo.
Au moment où il atteint se cible, celle-ci lâcha son pistolet, se pencha brusquement en avant et se mit à genoux, comme pour supplier.
- Je me rends.