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Chapter 15 - Chapitre 9 : tout est donnée

Ego était debout, là dans la chambre de la taverne, contraint d'attendre comme Aïma lui en avait donné l'instruction. Elle s'etait ensuite éclipsait, laissant alors la pauvre machine livrée à elle-même.

Dans sa solitude, il tendait son oreille ou plutôt ses capteurs sensoriels à tout ce qui passait dans leurs rayons d'analyse. Il attardait sur chaque détail essayant de comprendre toute chose. Le battement du cœur du tenancier de l'auberge, le rythme de la respiration des quelques oiseaux ayant fait nid dans la toiture, et même les paroles des habitants cheminant là dehors. Il tenait toutes sortes de discussions. Des paroles banales et pourtant si uniques. Le prix du pain, le poids des poisons standard disposé dans un étalage moyen. Les différentes espèces animales consommées pour se nourrir, leurs problèmes, leurs peurs et même leurs joies. 

Bien qu'il ne comprenait presque rien de tout ce brouhaha, doux bruit de la vie en Nomera. Bruit qui aux yeux de toutes autres personnes semblerait aussi imperceptible qu'inaudible car Ego écoutait toutes choses en même temps.

Tous ces points, toutes ces données perdues dans un espace complexes. Il commençait à les liés entre elles. Il tentait de généraliser là, assis sur ce qui semblait être un lit, le concept même de la société. Pourtant, personne ne l'écouterait lui. Car personne ne pourrait voir ce qu'il voit, entendre ce qu'il entend, comprendre comme il comprend. Communiquer avec toutes ces ombres qui se mouvaient, ruisselante dans cet océan de données était pour lui impossible .

"Distance de l'utilisateur 150 m."

Les vecteurs que formaient les mouvements de chaque être s'ordonnaient en un chaos suivant ses propres règles. Ils parcouraient un sens, direction précise qui ne semblait pourtant avoir aucune destination.

Et malgré tout Ego cherchait à comprendre. Il voulait savoir la raison de sa mission, les raisons de sa pseudo existence. Alors Il formulait des hypothèses, minimiser ses erreurs d'interprétation, modéliser la vie, la simulait, comparait son modèle au réel puis recommençait. 

C'était en fait ce que l'obligeait de faire les longues équations décrivant son système. À chaque fois qu'il se trompait, il apprenait. À chaque fois qu'il réussissait, il en tirerait une nouvelle certitude, règle, savoir. Un nouvel algorithme capable de s'adapter. Peut importe le temps. L'alliage qui le constitue ne subit que très peu les affres de l'age. Il cherchait et espérait trouver, bien qu'il ne savait ni pourquoi ni comment.

Des centaines de règles inhérentes à son système avaient été corrompues lors du crash. Cela avait eu pour lui deux conséquences majeures. La première, il était complètement livré à lui-même. La deuxième, elle, l'empêchait d'agir constamment, car son système pseudo-moral bloquait tous ses membres si Ego ne parvenait pas à prédire les conséquences directes de ses actions.

Ainsi, Ego n'a obtenu de son propre système qu'un droit d'agir limité puisqu'il ne pouvait interpréter pleinement ce qui l'entourait. Il s'était d'ailleurs, malgré le jeune âge de sa pseudo-conscience, déjà retrouvé maintes fois dans des situations dissonantes et par conséquent bloquantes. La sensation désagréable que ces circuits électroniques lui font subir dans de tels cas est mathématiquement si pénible pour lui qu'il faisait tout pour l'éviter.

En fait, de telles choques augmentent considérablement ses erreurs de calcul. Les concepteurs ayant mis en place son système de sécurité avaient évidemment raisonné de manière purement logique et algorithmique. Ils ne se souciaient que très peu de prendre en compte la perception qu'en aurait le robot. Ce pourquoi, afin d'empêcher tout geste malencontreux, il avait été préférable, selon eux, de causer un court-circuit provoquant un arrêt temporaire de certaines des fonctions pseudo-musculaires de ses dits membres.

"Langage N 002, apprentissage estimé : 20 %"

Ego se redressa prêt à partir. Il n'avait aucune raison de le faire si ce n'est sa curiosité insatiable. Ça et surtout Aïma qui semblait s'éloigner toujours plus loin de lui. Or Ego se rendait bien compte que si elle se trouvait trop loin. il aurait de nouveau le droit à l'une de ces décharges. Il estimait d'ailleurs, de ce qu'il avait pu observer dans la forêt, qu'une distance de confort avec sa cible ne devait jamais dépasser 500 mètres.

Car bien que ces capteurs quantiques permettent d'observer l'état de son utilisateur à une très longue distance.

Il se trouve qu'il en reste impossible pour Ego d'analyser ce qui entoure Aïma au-delà de cent mètres.

Au-delà de cette distance, Ego craignait donc de perdre le contrôle sur la situation. De devenir impuissant, incapable de prédire les possibles se situant dans l'interstice d'inconnues le séparant de sa cible. De plus, il fallait bien noter qu'Aïma a, aux yeux d'Ego, un véritable don pour être imprévisible. 

Ses mouvements, sa manière de courir vers le danger, tout cela frustré Ego énormément. Après tout il était désormais et depuis leur rencontre mathématiquement lié l'un à l'autre.

Il est obligé de prendre soin de son utilisateur bien plus encore que de tout autres choses autour de lui.

Lorsqu'il passa le pavillon de l'auberge, il redécouvrit la ville. Celle-ci était enluminé sous les teintes de l'aurore matinale. Il n'avait pu l'observait jusque la car ses capteurs longues distance ne lui permettaient pas d'observer la lumière. Ce pourquoi il n'avait jusqu'alors pu qu'entre voir la ville que sous les feux du crépuscule lors de son arrivé. Ego aimé la lumière du soleil, la douce chaleur de ses rayons réchauffait ses modules de limitations d'entropie. Tout comme les habitants de Nomera celà lui permettait de produire de l'energie même si la quantité n'était pas significative.

En vérité, les sens d'Ego étaient loin d'être parfaits. En fait, il devait estimer et extrapoler la plupart de ce qui l'entourait. L'interstice de bruits résiduels entre chaque donnée certaine était alors corrigé. Mis à jour par ce qu'il estimait comprendre. Remplacer par des probables affinés de son savoir comportemental. Aux yeux d'un être vivant tout à fait standard, cela pourrait ressembler à des hallucinations ésotériques produites par les effets de substance peu recommandable. Pourtant pour Ego tout cela à du sens ou du moins il faisait tout pour que ça en ait.

"score d'intégrité des protocoles de sécurité pseudo-morale estimée à 90 %"

Les savants ingénieurs ayant contribué à sa conception n'avaient rien laissé au hasard. Raison pour laquelle Ego possédait plus d'une manière de comprendre que son fonctionnement était altéré et bien plus encore de le remettre aux normes. Évidemment, la distance à tout serveur de l'alliance l'empêchait de se mettre à jour automatiquement. Ce pourquoi il était condamné à se contenter, tel un enfant prenant en main un nouveau jeu dont il ne connait pas les règles, d'apprendre. De chercher quelles combinaisons d'instructions lui permettrait de résoudre le puzzle, énigme dont la finalité était vérifiable, cadrée par une signature indélébile laissée dans un disque de diamant.

Cette marque lui servait de modèle d'intégrité statistique. En bref, la machine pouvait réécrire ses propres règles tant que celles-ci lui permettaient de respecter strictement le comportement décrit dans le disque. Quelle ironie que de savoirs qu'il ne comprenait pas ce que celles-ci signifiaient. Alors il cherchait et cherchait encore, mais l'être de métal n'avait jusqu'alors trouvé aucune pièce complétant l'image de manière satisfaisante. Aucune règle permettant d'améliorer son score d'intégrité. De plus, plus il établissait de nouvelles règles et plus il devenait difficile d'en trouver de nouvelles. Une comparaison possible à la difficulté de l'exercice serait de jouer à une loterie une centaine de fois en espérant gagner à chaque fois une partie de plus que lors du tirage précédent. En effet, les règles, une fois établies, étaient alors testées et vérifiées par les données enregistrées dans le disque de diamant. Aucune ne devait entrer en conflit avec les autres et plus le disque de diamants validait ses règles, plus son champ d'action augmentait.Raison pour laquelle Ego aurait pu continuer d'éluder ces pseudo pensées énigmatique encore longtemps. Cependant, l'univers en décida autrement :

"Utilisateur en danger"

La distance qui le séparait d'Aïma n'était que d'une centaine de mètres, mais ses capteurs quantiques venait de s'affoler. Il avait senti son cœur s'accélérer et ses muscles subir un fort stresse lié à l'effort. Il écoutait le danger qu'elle courait. En face d'Ego, se trouvait un large obstacle infranchissable, une immense structure circulaire qui s'élevait d'au moins vingt mettre en plein cœur de la ville. Face à une telle bâtisse, le robot n'avait que peu de solution à ses connaissances, alors pour éviter la prochaine décharge, Ego prit son élan.Il fléchit les jambes, donna l'impulsion du départ et s'élança. Courant à une vitesse inimaginable aux yeux des passants alors incapable de détourner leur regard. Puis il plissa de nouveau les jambes, exploita l'énergie cinétique de sa course folle et fit un bon d'au moins 3 mètres. Il s'agrippa, comme Aïma le lui avait apprit, au bâtiment et entama son ascension sur l'arène toujours avec la même maladresse pathétique.

Au sommet, il put enfin observer la scène de ses yeux. Dans l'arène, tous les spectateurs étaient crispés, les yeux rivés sur la scène hésitant à rire ou hurler.Aïma et Narth luttaient pour leur survie-là à la merci d'un homme vêtu de simples vêtements de soie empli de dorure royale.

Des flammes semblaient sortir des extrémités de ses membres, elles dansaient selon son humeur. L'homme riait, il se moquait, cynique de sa supériorité.Ego devait agir. Alors sous le poids des règles qui l'anime et toujours limité par son manque de connaissances. Il fit un bond, calculant cette fois sa trajectoire en piqué, espérant changer quelque chose.

Tête la première, la distance qui le séparait du sol l'effrayait bien moins que la punition réservée à la non-action. Ça chut provoqua une onde de choc tel que la poussière de l'arène s'envola comme un écran de fumée. Tous retinrent leur souffle un instant. Personne n'osait bouger et lorsque le nuage se dissipa, les spectateurs applaudirent, voyant le héros arrivé en scène persuadé que tout cela était orchestré.Une grimace horrible déforma alors le visage de l'homme aux dorures pourpre toujours un peu trop flamboyant.