Hope entra dans le manoir de ses grands-parents, en compagnie des ses amis. En se dirigeant vers la cuisine, ils croisèrent là grand-mère de Hope qui se balançait d'avant en arrière sur une chaise. C'était une vieille femme aux cheveux gris emmêlés et aux yeux bleu pâle. Son regard était vide et éteint.
- Elle ne va pas mieux ? interrogea Remy à voix basse.
- Pas vraiment… répondit Hope, attristée. Ça fait plusieurs jours qu'elle reste assise, à se balancer sur une chaise. Elle ne me répond plus quand je lui parle. Les seuls moments où elle bouge, c'est pour manger, dormir et se laver. Attends, non ! Il y a une amélioration : maintenant, elle se lève parfois pour aller à la bibliothèque de la maison.
- C'est déjà ça… soupira Remy.
Une fois dans la salle à manger, Hope prépara un petit goûter pour ses amis, qu'ils dégustèrent en discutant de choses et d'autres et en échangeant diverses banalités.
Au moment de saluer ses amis, elle aperçut sa grand-mère passer derrière elle, toujours le regard vide. Après avoir dit au revoir à ses amis, elle décida de la suivre ; sa grand-mère, Margaret, ne faisait plus vraiment attention au monde qui l'entourait, et elle tombait et se cognait régulièrement. Comme son grand-père Louis n'était pas là, Hope décida que c'était à elle de faire attention à cette vieille femme déconnectée du monde. La jeune fille aimait sa grand-mère, car c'était elle qui l'avait élevé. Elle n'avait jamais connu sa mère, et son père lui rendait visite de temps en temps, mais il était extrêmement occupé par son travail.
Décidée, Hope suivit sa grand-mère dans le couloir, prête à lui venir en aide si quoi que ce soit ne se passait. Même si l'adolescente ne faisait rien pour se cacher ou être discrète, sa grand-mère ne paraissait pas remarquer sa présence. La vieille femme se dirigea silencieusement vers la bibliothèque ( rien de surprenant pour Hope ; sa mamie avait toujours été une femme discrète ).
Une fois dans la bibliothèque, la vieille Margaret commença à chercher quelque chose. Hope s'assit dans un coin, sortit son téléphone, connecta ses écouteurs et lança sa playlist préférée. Elle saurait si sa grand-mère se faisait mal, elle l'entendrait bien. Par précaution, la jeune fille continua à observer sa grand-mère du coin de l'œil. La vieille femme continuait à chercher quelque chose dans la bibliothèque. Elle finit par prendre un livre et s'assit dans un fauteuil, manquant de peu de s'étaler sur le sol. Margaret s'installa tout au fond de son fauteuil de cuir, et ne semblait pas vouloir bouger.
Rassurée, Hope ferma les yeux et se laissa emporter par sa musique. Rien ne pourrait arriver à sa grand-mère tant qu'elle était sur son fauteuil ; elle ne risquait pas de se cogner la tête contre une armoire ou de s'évanouir et de tomber sur le sol. La jeune fille commença à somnoler.
Hope ouvrit les yeux soudainement, réveillée par le bruit des ressorts du vieux fauteuil. Elle aperçut sa grand-mère tourner vers la porte et sortir de la bibliothèque, laissant son livre sur le fauteuil en cuir. Hope se leva et se dirigea vers le fauteuil pour ranger le livre. Elle jette un coup d'œil à la couverture. Il s'agissait d'un livre sur la maçonnerie marocaine au XIVe siècle. La jeune fille pouffa ; qui pouvait bien être intéressé par un sujet pareil ? C'était bien trop précis et absurde, sa grand-mère n'avait jamais été intéressée par la maçonnerie en général, alors pourquoi un livre au thème aussi précis ? Ne sachant où le ranger dans la large bibliothèque de la maison, elle le posa sur une pile de livres qui traînait là. Au loin, elle entendit son grand-père l'appeler. - J'arrive ! hurla Hope à travers la maison. C'était déjà l'heure de manger ! La jeune fille n'avait vraiment pas vu le temps passer. Après avoir traversé un dédale de couloirs, elle alla dans la salle à manger rejoindre ses grands-parents.
Hope ne s'était jamais sentit à l'aise dans cette grande maison. Elle était trop grande, trop spacieuse, trop rangée pour la jeune fille. Elle aurait largement préféré vivre dans un petit chalet, ou dans une maisonnette de campagne plutôt que dans ce manoir où elle se sentait seule.
Lorsqu'elle fut attablée et ai eu commencé à manger, son grand-père la questionna sur sa journée.
- Alors, c'était un bon samedi, avec Ashley et Remy ?
- Oui, bien sûr, répondit l'adolescente. On a joué au loup, comme quand on était petits. Ça faisait bizarre, mais c'était drôle, conclut-elle entre deux cuillerées de soupe.
- Rien de spécial ? demanda le vieux Louis.
- Non, je ne crois pas.
- Tu es sûre ? Rien de particulier, ou d'inhabituel ? Pas de chose étrange ou surnaturelle ?
Prise au dépourvu par ces questions, Hope répondit d'une voix sans intonation :
- Non, rien de spécial, c'était une journée ordinaire pour moi.
Ce n'était pas vraiment un mensonge ; devenir invisible était devenu habituel pour elle. Pendant une seconde, elle hésita à en parler à ses grands-parents, mais elle se ravisa. Elle ne prononça pas un mot.
La suite du repas se passa sans bruit, et à part les bruits des couverts sur les assiettes, personne n'osa dire un mot. Son grand-père semblait déçu et paraissait réfléchir sur quelque chose d'insaisissable pour Hope. La jeune fille brisa le silence ambiant lorsqu'elle annonça qu'elle allait se coucher, et personne ne lui répondit.