YL.
Campagne de recrutement du second corps.
La société est un endroit qui rend confus, qui vous déboussole comme un brouillard. Plus vous communiquez et plus elle vous aliène ; plus les moyens de communication se multiplient et plus vous vous y perdez, plus vous vous laissez couler, voler, grignoter.
Ce qui me différencie des autres ? J'ai probablement entendu plus que la majorité des personnes que vous allez rencontrer aujourd'hui. Je ne suis pas aveugle à la mécanique déphasée que vous déroulez sous les yeux du public. Enfin, c'est ironique puisque je peux seulement l'écouter.
Je n'ai jamais eu besoin de tenir une radio mais on m'appelle YL. J'ai l'information dans le sang bien que je ne lise pas les pensées. Idéaux grandioses, discours fallacieux, tout a coulé un jour ou l'autre dans mes veines. Je suis peut-être jeune mais j'ai remarqué à quel point notre monde est encore peint avec force en noir et blanc, en demi-teintes, à quel point on se laisse tous flotter sur une société qu'on a construite, qui nous dépasse.
Je mentirais si je disais que je n'ai jamais éprouvé le rêve ni l'envie de changer le monde, mais je sais pertinemment que ce dernier sera le premier à me faire ployer. Votre place est donc parfaite pour moi.
Je ne suis pas la bleue idéaliste que vous pensez, je resterai dans la foule, sans dépasser, sans que vous n'ayiez à me couper. Mais je sens la moindre des informations comme une coulée froide, et aucun ne vos messages ne m'est inconnu. Aucun de vos sourires en coin, aucune de vos mascarades, des attelles sociales qu'on essaie de fixer. Aucune des bombes qu'on avale sans cesse, en doses homéopathiques, tout en bienséance et en "politiquement correct", et qui nous conditionnent.
Pourquoi vous auriez besoin de moi? Parce que je n'ai pas la prétention de comprendre ce que je connais.
Comment puis-je alors le connaître et le transmettre, comme tout bon informateur ? Tout simplement en répétant ce qui m'est sans cesse jeté à la figure, cette mécanique dont je vous parlais. Je vous l'ai dit n'est-ce pas ? J'ai l'information dans le sang : pas de compréhension nécessaire, elle est là, chimiquement. Peu importe l'endroit, la position, je saignerai la matière des secrets qui la traversent.