Chereads / J'ai prétendu être la Mort, mais elle m'a tenu tête. / Chapter 100 - À l'époque, elle dirigeait le groupe.

Chapter 100 - À l'époque, elle dirigeait le groupe.

À l'avant de la classe, plusieurs élèves parlaient entre eux, comme la plupart des groupes le faisaient dès que la sonnerie indiquant la pause de la mi-journée retentissait.

C'était toujours l'occasion de parler de tout et de rien, des dernières tendances, de quels profs étaient insupportables, ou au contraire, sympathiques. C'était aussi l'occasion de faire circuler les informations entre les différentes classes, de renforcer les rumeurs, ou encore de d'en créer de nouvelles.

Certaines filles discutaient avec les garçons qu'elles appréciaient, espérant se rapprocher d'eux et sortir avec eux. D'autres encore s'échangeaient des astuces pour se maquiller sans se faire repérer par le personnel enseignant, ou prévoyaient des sorties en salles d'arcades ou salles de karaoké après les cours. Le genre de discussion classique auquel Hana ne s'intéressait pas, assise seule au fond de la classe.

Pourtant, même si cela ne l'intéressait en rien, elle était tout de même incluse malgré elle.

« Au fait, c'est qui ça ? » Demanda un des garçons.

Il avait désigné discrètement la jeune femme restée seule, malgré tous les groupes de discussion s'étant formés.

« Ah, ça ? » Dit une des filles du groupe qui avait mis une barrette violette pour tenir sa frange sur le côté. « C'est personne. »

« Comment ça, personne ? » Insista le garçon.

Il n'était pas de leur classe, et ne devait donc pas encore être au fait de toutes les rumeurs entourant la jeune fille. La fille à la frange se sentit donc obligée de lui expliquer la situation.

« C'est Takeuchi Hana, mais tout le monde l'appelle la recluse. Elle prends les gens de haut et ne parle à personne. » Dit-elle avec une certaine agressivité à peine dissimulée. « Cette fille se croit meilleur que tout le monde, avec ses grands airs, et vu qu'elle ne veut parler à personne, personne ne prends plus la peine d'aller lui adresser la parole. »

« Elle a pas l'air si mauvaise que ça... » Observa le jeune homme en la regardant lire un livre.

« Tu m'as pas entendu ? Elle se fiche de tout le monde et ne participe jamais à rien. » Insista la jeune fille à la barrette violette.

Cependant, le garçon ne l'écoutait déjà plus, et se penchant en arrière pour passer sa tête à travers une des vitres ouvertes sur le couloir intérieur du bâtiment, se mit à hausser le ton.

« Hé ! Jun ! Viens par là ! » S'exclama-t-il en faisant signe à un autre garçon.

Le jeune homme, environ à une dizaines de mètres plus loin dans le couloir et devant une autre classe, se retourna en entendant son prénom, et se pointa du doigt avec incrédulité, comme s'il demandait confirmation que c'était bien lui qui était appelé.

« Ouais, toi ! » Dit avec agacement le jeune garçon dans la salle de classe. « Viens par-là ! »

Le dénommé Jun, comprenant qu'il était bien la cible de cet appel, s'approcha alors de la fenêtre ouverte, de façon à parler au groupe sans devoir faire le tour pour entrer dans la salle de classe par la porte d'entrée.

« J'ai oublié de vous le présenter, mais voici… Euh... » Hésita-t-il.

« Jun, juste Jun, » sourit l'autre garçon.

« Ouais, enfin bref, voilà Jun ! » Le présenta-t-il au reste du groupe. « Il vient à peine d'arriver, transféré de… De où déjà ? »

Le dénommé Jun se contenta de sourire pour refuser de répondre poliment à la question. Il avait déjà été présenté pendant le premier cours de la journée par le professeur principal, donc il trouvait ça superflus de se répéter aussi rapidement pendant son premier jour dans ce nouvel établissement. Il espérait juste que ces jours paisibles dureraient sans qu'il ait besoin d'être constamment sur ses gardes.

« Hum… Ouais.. Enfin bref, Jun, je veux ton avis ! » Lui dit-il en s'approchant de lui à travers la fenêtre ouverte. « Qu'est-ce que tu penses de cette fille là-bas ? »

« Je dirais qu'elle a l'air super sérieuse et du genre à lire beaucoup ? » Tenta de répondre Jun.

Ce n'était pas comme s'il faisait autant attention que cela aux filles, et encore moins à celles qui n'étaient pas dans sa classe.

« T'es idiot ou quoi ? Je te demande si tu la trouves attirante, pas de me décrire ce que tu vois avec tes propres yeux ! » Se moqua l'autre garçon.

« D-désolé... » S'excusa maladroitement Jun.

« Et donc, t'en penses quoi ? » Demanda l'autre garçon.

« Penser… Quoi ? » Dit avec doute Jun.

L'autre garçon, du nom de Ryuji, soupira avant de se tourner vers le reste du groupe.

« Si elle parle à personne, elle doit pas avoir de copain, non ? »

Les filles du groupe comme les garçons le regardèrent avec surprise, n'étant pas vraiment sûrs de ce qu'il voulait dire par là. Jun, pas trop intéressé par la tournure des événements, s'éloigna à nouveau dans le couloir pour aller rejoindre les garçons qui parlaient de DraQuest ensemble. Chiho, elle restait silencieuse, mais sentait que les choses allaient déraper.

Elle était dans ce groupe depuis le début de l'année et avait rapidement sympathisé avec l'une des filles le menant – ce genre de personnes charismatiques, qui vous donnait toujours envie de les suivre, peu importe où elles allaient. C'était toujours ce même profil de personnes qui dirigeaient des groupes entiers d'une simple suggestion, que ce soit les nouvelles modes, les sorties après els cours, ou qui ne pas approcher.

En ce sens, Kaeri était à la fois la meneuse du groupe, et la personne imposant des limites ; et le garçon qui parlait, Ryuji, était celui qu'il ne fallait pas approcher. Selon une règle discrète et non parlée, la personne qui était dans le viseur de Kaeri ne devait jamais être approchée. Si Kaeri avait envie de sortir avec cette personne, toutes les autres devaient s'écraser et ne pas convoiter ce qui, selon elle, lui revenait de droit.

C'est exactement pour cette raison, que les paroles suivantes de Ryuji lui firent serrer la mâchoire.

« Dans ce cas, je peux lui demander de sortir avec moi, non ? » Sourit-il.

Ah. C'était ce moment-là que Chiho redoutait. Le moment où l'objet de l'obsession de Kaeri échapperait à son contrôle, et lui ferait perdre la face.

Plus aucune fille n'osait dire un seul mot dans le groupe, conscientes que la parole de Kaeri faisait loi, et que le moindre faux-pas pouvait les mettre sur la sellette.

Quant aux garçons, ignorant totalement l'entente silencieuse des filles, ils s'amusaient déjà à se moquer et à lancer des paris pour savoir si Ryuji arriverait à sortir avec l'autre jeune fille. Ils ne se doutaient pas une seconde que Kaeri fulminait intérieurement.

« Tu vas tellement te faire rembarrer ! » Se moqua un des garçons du groupe.

« Et alors ? Au moins, j'aurais essayé, non ? Elle a l'air plutôt mignonne comme fille, et si son seul défaut c'est de pas parler, ça me va ! » Répliqua Ryuji, amusé.

Il y eut un éclat de rire général, qui ne manqua pas d'attirer brièvement l'attention de tous les autres élèves dans la classe, y compris Hana.

La jeune fille leva rapidement un regard curieux vers eux, avant de replonger presque immédiatement dans son livre.

« Regardez comment elle se fiche de tout… C'est plutôt cool, comme attitude. » Dit avec admiration Ryuji. « C'est super mature comme attitude ! »

« Mature ? » Répéta Kaeri en serrant les dents. « C'est pas plutôt agir en gamine, que de pas faire attention aux autres et de rester dans son coin ? »

« Nah, je pense qu'il faut du caractère pour agir comme ça, » balaya d'un revers de main Ryuji.

Avec sa réponse, les filles du groupe, Chiho comprise, ne purent s'empêcher de déglutir en lenteur tout en lançant des regards inquiets vers Kaeri. La jeune fille fronçait les sourcils, le côté extérieur de ses yeux se plissant pour montrer son exaspération. Elle n'aimait pas du tout ce qui était en train de se passer, et comme toute personne rancunière, si Ryuji échappait à son contrôle, elle ne laisserait pas ça entacher son image.

« Ryuji, attends- » Commença-t-elle.

Cependant, le jeune homme n'attendit pas la fin de sa phrase, et commença déjà à se diriger vers le pupitre occupé par Takeuchi Hana, sans rien ni personne pour l'en empêcher.

Suivant ses mouvements du regard, Kaeri le vit slalomer entre les rangées de pupitres et de chaises, les autres groupes d'élèves et les sacs sortis de leurs casiers pour atteindre la jeune fille.

Puis, sans aucune hésitation, il serra sa main en forme de poing, avant de toquer sur le bureau de la jeune fille comme il l'aurait fait à une porte.

Surprise, Hana leva les yeux vers lui.

Son regard semblait dire qu'elle ne comprenait pas comment quelqu'un pouvait encore chercher à lui parler, ce qui poussa Ryuji à se présenter.

« Yo ! J'suis Asanuma Ryuji ! » Dit-il en tendant une main vers elle.

Hana fronça les sourcils, confuse. Elle ne savait pas trop ce que ce type lui voulait, mais s'il souhaitait lui parler, il n'aurait pour réponse que du silence.

Voyant que la jeune femme ne lui serrerait pas la main, Ryuji se ravisa.

« Peut-être trop direct pour toi, pas vrai ? » S'excusa-t-il. « Dans ce cas, qu'est-ce que tu dis de venir me parler, seul à seul, après les cours ? »

Les sourcils d'Hana se froncèrent encore plus, signe qu'elle n'était pas d'accord.

Ryuji chercha alors un moyen de la convaincre.

« Tu sais, j'osais pas te demander ça, mais j'ai vraiment des difficultés à prendre les notes en cours de maths… Et j'ai vu que tu prenais toujours des notes vraiment bien... » Dit-il.

Hana relâcha un peu son air sévère, signe qu'elle semblait l'écouter.

« Alors… Euh… Si ça te dérange pas, tu peux me retrouver après les cours en club d'informatique ? » Demanda-t-il avec précaution. « J'apprécierais de pouvoir copier tes notes… »

Voyant que Hana ne disait toujours rien, il se sentit obligé de rectifier son offre.

« Ou même… Ou même les prendre en photo avec mon portable ! » Dit-il en sortant son smartphone de sa poche et en le pointant du doigt.

La jeune fille regarda le téléphone du jeune homme tandis qu'elle semblait peser le pour et le contre, et sentant que sa chance pouvait lui échapper, Ryuji reprit rapidement la parole.

« Bon, je compte sur toi, hein ! » Sourit-il avant de s'éloigner.

Il ne lui avait même pas laissé le temps de répondre, pour mettre toutes les chances de son côté.

Aux yeux de Kaeri, c'était la chance de trop, et elle serra les poings sous son pupitre.