Le lendemain je me préparais pour le tournage, je me maquillais légèrement. Ma mère m'aidait à mettre ma robe puis nous nous rendions devant la caméra. Christian Gautier mit son uniforme, il avait pris l'air sérieux et avait un regard concentré. Je jouais le rôle d'une jeune fille qui tombait amoureuse d'un soldat. Quand on essayait de jouer le rôle je m'approchais de lui avec dégoût, il prit ma main et me regardait droit dans les yeux. Ses yeux bleus verdâtres étaient remplis de passion et d'amour, il caressait ensuite mon bras en montant vers mon épaule, mais bon, nous étions en train de jouer nos rôles d'amoureux. J'avouais qu'il était un bon acteur.
Après le tournage, Christian vint à moi et me disait en riant :
- Parmi toutes les actrices que j'ai joué avec, vous étiez la seule à me regarder d'une façon aussi ferme.
- Êtes-vous en train de critiquer ma profession ? lui répondais-je d'un ton dur.
- Non, je disais juste que nous jouons le rôle d'amoureux, et c'était difficile pour moi de le voir en vous.
- Regardez, tant que M. Deschamps ne me dit aucune remarque, je suis donc sur le bon chemin. Je n'ai pas à apprendre de vous malgré vos talents.
- Vous pensez que j'ai du talent ? me répondait-il en riant.
- Je vous en prie, je n'ai pas le temps pour votre orgueil.
- Orgueil ? Vous pensez vraiment cela ? me demandait-il tout fâché.
- À demain M. Gautier.
Je pris mes affaires et quitta le studio immédiatement.
Quatre semaines de tournage étaient déjà écoulées. Christian et moi ne nous parlions que pour réciter nos textes. C'était difficile de jouer le rôle avec lui, malgré sa beauté sublime et fascinante, et ses mains qui ont des traits de divinités, tellement splendides, malgré ma haine envers lui, chaque caresse me donnait des frissons et j'ai eu peur qu'il le remarquait mais il ne disait rien. Ses bras étaient robustes et musclés, le fait de les regarder me déstabilisait. Quand je mis ma main sur sa joue, je la promenais un peu plus haut vers sa belle chevelure qui était encore plus douce que de la soie. Et aussitôt qu'on criait « couper » nous nous éloignions tout de suite.
- Bien jouer tout le monde ! Adelheid et Christian vous avaient fait un bon travaille. Adelheid vous avez fait beaucoup de progrès comparé au premier tournage ! s'exclama M. Deschamps.
- Elle est tombée sous le charme. Se moquait Christian.
- C'est vrai, c'est beaucoup plus facile de tomber sous votre charme quand vous prenez la personnalité d'une autre personne. Lui répondais-je.
- Allons maintenant, ce n'est pas le temps de se taquiner, nous sommes déjà à la moitié du tournage, nous devons célébrer ! Se réjouissait M. Deschamps.
- Nous célèbrerons à la fin du tournage, lorsqu'on se dira enfin adieu. Disait Christian d'une voix sévère.
Nous quittions le studio et partions chacun à notre domicile.
Allongée sur mon lit, M. Deschamps nous téléphona et nous disait qu'on devait être obligés de prendre le train et quitter la ville à cause des problèmes technique au studio. Nous nous rendions donc à Innsbruck, l'une des plus belles villes d'Autriche. Ma mère et moi récoltions nos affaires, le train avait lieu demain à midi.
M. Deschamps invita ma mère à lui rejoindre près de lui dans le train, elle accepta immédiatement pourtant je lui avais prié de ne pas me laisser seule avec Christian, mais je n'ai pas eu le choix.
Il était assis juste en face de moi, nous ne nous parlions pas pour un bon moment jusqu'à ce qu'il me posa une question :
- Qu'est-ce qui vous a tellement intrigué à rentrer dans le monde du cinéma si vous ne pouvez tolérer tous les acteurs ?
- Ma mère m'a proposé un rôle avec elle.
- Et pourquoi aviez-vous continué ? Pour la gloire ?
- Vous pensez vraiment que je suis ce genre de personne ? Ne pensez-vous pas que j'ai de la passion ?
- Je ne sais pas, je suis en train de découvrir qui vous êtes.
- Il n'y a pas grand-chose à savoir. J'ai décidé de participer dans ce domaine quand j'ai appris que mon ami était mourant, il m'avait conseillé de suivre ma passion et j'admirais toujours ma mère depuis mon plus jeune âge. Je rêvais toujours d'être comme elle.
- Et vous pensez que vous êtes comme votre mère ?
- Non, je n'en suis même pas proche.
- Pourtant je trouve que vous avez atteint un bon sommet pour votre âge. Me disait-il.
Je lui souris faiblement et lui demandais :
- Et vous ? Vous avez toujours rêvé d'être acteur ?
- Non, pas du tout. J'étais dans l'armée française quand j'avais dix-huit ans. Mais on m'avait viré car j'avais volé la voiture du colonel. Ensuite je partais très souvent dans des bars et je buvais avec des amis, jusqu'à ce qu'un jour je rencontrais une actrice. Elle m'avait dit que j'avais une beauté fascinante qui me permettra de faire un grand succès dans ma vie, elle me proposa donc de la rejoindre dans cette aventure. Je ne voulais pas être acteur, mais après tout je n'avais pas trop le choix, mes parents mourraient de faim, j'étais leur seul espoir. Maintenant que j'ai vingt-trois ans, j'ai réussi à les sauver de la pauvreté qu'ils étaient et nous vivons à présent paisiblement.
- Je suppose qu'elle est votre compagne maintenant ?
- Cela vous importe vraiment ? me questionnait-il en riant.
Je rougissais et retournais ma tête vers la fenêtre puis il rajouta :
- Je plaisante avec vous, non, nous ne sommes plus ensemble, je ne suis sorti avec une femme il y a un bon moment.
Nous parlions encore pour quelques instants jusqu'à ce que le train s'arrêta, nous étions enfin arrivés.